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Note: un lien en fin d'article vous permet d'accéder à l'interview de Laurent Gabaroum dans laquelle il répond aux questions de notre rédaction.
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Le fait de société présenté cette semaine par Grioo.com paraît surprenant en 2004, en France, pour une société comme Renault, qui dépense tant d’argent pour son image, et qui a su avec talent négocier son passage de l’ex « régie » qu’elle était à une société plus moderne.
L’évolution ne fut-elle que de façade dans un certain nombre de domaines ? C’est ce que semble estimer Laurent GABAROUM dont le cas a été porté à la connaissance du grand public par les médias français.
Compte tenu de la longueur de la description, nous vous conseillons d’imprimer la chronologie des faits telle qu’elle nous a été rapportée par M. GABAROUM lui-même, qui a accepté de rencontrer deux membres de notre rédaction afin que les grioonautes puissent apprendre ce qu’il est encore possible, en attendant que la justice tranche, de faire en 2004.
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Laurent Gabaroum
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grioo.com |
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L’arrivée en France et l’entrée chez Renault
M. Laurent GABAROUM est d’origine tchadienne, d’une famille ne semblant pas spécialement nécessiteuse d’après la description qu’il nous en fait. Son père, décoré par le Général De Gaulle le 5 novembre 1949 pour faits de résistance est un chef ayant plus de 200 femmes, mais lui délaisse le Tchad pour poursuivre des études au Canada, puis en France.
Comme beaucoup d’étudiants africains en France, Laurent GABAROUM connaît la précarité, et doit, en même temps qu’il arpente les bancs de la prestigieuse IEP (« Sciences Po » Paris) survivre en cumulant les petits boulots. « Grâce » à un ami, Laurent GABAROUM réussit à rentrer chez Renault comme veilleur de nuit : la qualification « agent productif Renault de catégorie B » est marquée sur son contrat de travail le 15/07/1975.
Veilleur de nuit chez Renault était une activité plutôt « pépère » d’ordinaire réservée à des employés ayant entre 50 et 55 ans, en fin de carrières ou rendus invalides par un accident de travail.
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Laurent Gabaroum
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africatime.com |
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La suite des études
Sa subsistance assurée par cet emploi, Laurent GABAROUM achève ses études à l’IEP, et s’inscrit à un DESS de gestion et logistique commerciale à l’Université Paris Dauphine pour lequel il fallait un stage de 3 mois de validation, demande un congé sans solde à son supérieur chez Renault, qui dit que c’est impossible, qu’il peut lui accorder un mois tout au plus. Son supérieur l’envoie à la DRH qui le prend pour un espion : il est bien trop diplômé pour être veilleur de nuit !
La DRH décide de le garder comme garde. Sans changement de contrat de travail.
Le jeune DRH qui voulait modifier son contrat de travail rencontre une vive opposition dans sa hiérarchie, qui le contraint à revenir sur sa promesse. Il lui explique « mes chefs m’ont dit que le moment n’était pas venu d’installer un noir dans un statut de cadre ».
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mes chefs m’ont dit que le moment n’était pas venu d’installer un noir dans un statut de cadre |
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| Laurent Gabaroum |
Nous sommes en 1982.
Les options que lui laisse Renault
Renault lui laisse l’option de prendre un congé sans solde ou de quitter l’entreprise. Le directeur d’une filiale de logistique de Renault, la CAT, accepte cependant de le prendre en stage pour les 3 mois.
Renault revient à la charge en renouvelant la promesse de le passer au statut cadre, et renouvelle son stage pour 3 mois le temps « de trouver un poste ».
Au bout de 6 mois, « on n’a pas trouvé de poste pour vous » lui répond la DRH. Il veut reprendre son poste de nuit, Renault refuse, mais lui propose de prendre un poste de surveillant de jour.
Il venait de soutenir sa thèse de doctorat !
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La rencontre avec le PDG !
Laurent GABAROUM devient donc surveillant de jour, et officie à l’étage du PDG, Bernard HANON. Un jour, ce dernier attendait des visiteurs américains, et a vu Laurent leur parler en anglais. Médusé, il lui demande où il a appris l’anglais, et surpris s’entend répondre « dans le cadre de mes études ».
Le PDG l’invite à déjeuner, tombe des nues devant son histoire, et refuse que le racisme ait droit de cité dans son entreprise. Il convoque le DRH, qui à son tour convoque Laurent.
Quelques heures avant la rencontre, un collègue de Laurent entend le DRH dire à table « Même les noirs veulent passer cadres. Le singe n’est pas encore descendu de l’arbre : tant que je serai en vie cette trahison n’aura pas lieu. Que veut dire être blanc si les noirs doivent nous commander chez nous ? »
La rencontre tourne court puisque pendant 45 minutes le DRH lit son journal en fumant sa pipe, et ne comprend pas l’origine de la fuite : « Je n’ai aucun problème avec vos diplômes. Mais le diplôme ne fait pas l’homme. N’oubliez pas que vous êtes noir. Acceptez d’oublier vos diplômes et je vais vous aménager un petit poste pour gagner votre croûte ».
Laurent refuse, le DRH lui donne 48H pour donner la réponse « à son secrétariat », ce à quoi Laurent rétorque : « je vous dis non tout de suite », compose le poste du PDG Bernard HANON et lui dit : « il recommence ». On lui promet (fin Décembre 84) qu’il passe cadre le 1er Janvier 85.
Le 15 Janvier 1985 Monsieur Bernard HANON est débarqué.
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Laurent Gabaroum
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grioo.com |
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La « promotion »
Il est « promu » cadre, mais on lui donne le salaire le plus bas possible pour qu’il ne puisse pas grimper dans la hiérarchie : responsabilités et rémunération étaient liées chez Renault.
Perfidie supplémentaire, il est « personnel non affecté ». Il n’a donc pas de poste et donc pas d’objectifs à atteindre, et n’ayant pas atteint d’objectifs en fin d’année, il ne peut prétendre être promu.
Affecté à la gestion informatisée des ingénieurs et cadres pendant 7 mois, puis responsable de la « Bourse des emplois » du groupe Renault, il a accès aux emplois disponibles, et demande à être affecté à l’un de ces postes : « l’entreprise va mal, on va licencier des blancs, comment voulez-vous qu’on donne un poste à un noir ?».
A cette époque Renault proposait des enveloppes de 300-400.000 pour les départs volontaires.
Convoqué par la direction qui lui demande sa nationalité, il répond « français » car né avant les indépendances. Renault lui propose 150.000 (même à ce niveau ils n’ont pas la décence d’être « équitables ») pour renoncer à sa nationalité française.
Nous sommes en 1986.
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Laurent Gabaroum
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grioo.com |
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La situation se durcit
LAURENT GABAROUM fait 15 jours de grève de la faim, pendant que Renault estime ne pas être raciste, mais avoir affaire à un employé « incompétent ». Il demande alors un test de compétence, Renault le place chez SCOA (Société Commerciale de l’Ouest Africain) comme directeur de cabinet du PDG sur des opérations ponctuelles sur l’Afrique. Science Po et le CNRS sont chargés d’évaluer ses compétences intellectuelles, SCOA sa compétence professionnelle.
Un compte-rendu public devait être fait au bout d’un an.
Les résultats tombent au bout d’un an, Rien A Signaler, les compétences sont bonnes, il est remis dans le circuit Renault. Après avoir tenté de lui racheter sa nationalité française, Renault décide alors de l’envoyer en Afrique. Nous sommes entre 1987 et 1988, et lui le juriste est envoyé faire de l’agriculture, de l’irrigation, fabrication de nourriture de bétail !
Le retour en France, les comparaisons 16 ans plus tard
1989, LAURENT GABAROUM revient en France, on l’affecte en après-vente, job « d’ingénieur » d’après lui, où il apprend rapidement, et obtient de bonnes notes. Il est cependant moins augmenté que ne le prévoient les accords Renault, ce qui nécessite, en principe, une justification écrite.
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Laurent Gabaroum
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grioo.com |
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Bien qu’ayant atteint tous ses objectifs, ses primes de performances sur objectifs cumulées en 16 ans culminent à 4.500€, alors que d’autres collègues d’ancienneté comparable sont à 70.000€ bien que n’ayant pas eu des parcours exempts de reproche.
Son ex-secrétaire (diplômée d’un CAP) est aujourd’hui cadre de même niveau que lui et de rémunération supérieure.
La personne qui remplissait les feuilles de sécurité sociale (CAP compta) est aujourd’hui son N+2 (« le chef de son chef »), et gagne deux fois son salaire, sans avoir eu de formation supplémentaire spécifique.
LAURENT GABAROUM demande alors la mobilité pour augmenter ses chances d’être bien vu : accord de sa hiérarchie directe, mais pas la DRH.
Pendant 10 ans ce sera le statu quo professionnel, à salaires constants. Le but est clair : le pousser à la démission.
En 1999 LAURENT GABAROUM refuse l’entretien annuel sans tierce-personne afin d’avoir la preuve des obstacles rencontrés par ses supérieurs hiérarchiques.
En 2000 son nouveau patron estime qu’il ne peut pas le noter, « faute de bilan 99 pour juger ».
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Louis Schweiter, le PDG de Renault
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volvo.com |
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La rencontre avec Schweitzer, le début de l’action
Reçu par Louis Schweitzer qui estime que Renault « œuvre à promouvoir des compétences confirmées », Laurent GABAROUM fait valoir son expérience et son professionnalisme tirés de son évaluation professionnelle.
La direction générale de Renault reconnaît cependant qu’il y a un problème dans le déroulement de carrière de Laurent GABAROUM, et est contrainte d’augmenter son salaire de 18% pour qu’il atteigne le seuil minimum de passage à la position « 3A ».
Juillet 2000, LAURENT GABAROUM est affecté à la direction des ventes spéciales exportation comme chargé de mission.
Compte tenu de ses responsabilités antérieures, cela correspond à une rétrogradation.
C’était pour le « calmer » car son Directeur connaissait bien l’Afrique et les africains. Atteint par la limite d’âge, celui-ci part à la retraite en 2002. Son successeur se désintéresse aujourd’hui du sort de Laurent GABAROUM.
Depuis 2000, Laurent GABAROUM est chargé de mission sans mission.
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